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J'aurais bien aimé être une fille comique...
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17 juin 2011

Souvenirs d'été (suite)

6a00e550b7476c883401538e0254fc970b_500wiLes dernières semaines de vacances en famille passées à Caorle furent certainement les plus belles de mon "adulescence". Posée au bord de la mer Tyrrhénienne, la station balnéaire italienne s'étire le long de deux plages dont la plus large, la plus agréable est sans aucun doute celle du Levante - là où se lève le soleil. Peint dans un jaune et un blanc solaires, l'hôtel où nous descendions toujours ressemblait à tous les autres : des balcons sur lesquels séchaient des serviettes de plage, un bar ouvert sur la rue servant des cappuccinos au petit matin et proposant des Spritz dès 17h, une grande enseigne lumineuse qui, à la tombée de la nuit, s'éclairait et faisait ressortir dans le ciel noir des lettres multicolores.

Il fallait passer le seuil du hall d'entrée pour savoir que l'endroit était différent : chaleureux, familial, chiquement décontracté. Dans cet hôtel-là, le patron connaissait notre nom et nous faisait la bise ; les serveuses nous taquinaient et nous serraient dans leurs bras quand il fallait partir ; les autres vacanciers - suisses, allemands, français, irlandais - discutaient amicalement avec nous et nous faisaient signe quand ils nous croisaient sur la plage. Quant au cuisinier, il était tellement sympathique qu'il mettait au menu un gratin à la parmigiana quand mon père lui en faisait la demande.

Les heures s'écoulaient lentement, prise dans une routine estivale et légère. Les journées commençaient vers 8h au bord de la piscine où le petit-déjeuner était servi. Je me souviens de ces énormes et savoureux pruneaux gorgés de jus sucré, du yaourt aux fruits rouges, des petits sets de table Winnie l'Ourson mis à la disposition des plus petits. Parfois, mon père et moi nous levions plus tôt pour faire quelques brasses dans la mer quiète et scintillante. Les journées étaient essentiellement sportives et intellectuelles. Je lisais Stanislavski, Albert Cohen, Cecelia Ahern et Georges Perec. Entre deux chapitres, j'allais faire des longueurs dans l'eau salée, je courais le long de la digue, malgré un soleil de plomb, ou mes soeurs et moi allions suivre les cours d'aérobic sur la plage, un cours qui prenait des allures de galerie merveilleuse où les corps - gros, gras, maigres, grands, petits, musclés, flasques, vieux, vigoureux, fatigués, bronzés, brûlés - bougeaient au son des rythmes de l'été. 

Après le repas de midi, quand la chaleur était trop forte, ma petite soeur et moi nous retrouvions dans la chambre pour regarder un dvd. Encerclant nos jambes de nos bras, les lunettes posées sur le bout du nez, les cheveux encore salés de la matinée, nous regardions les grands blockbusters en V.O. How to lose a guy in 10 days était de loin notre préféré et nous en connaissions les répliques par coeur à force de le revoir chaque été. Vers 18h, à l'heure où les ombres s'étiraient sur le sable, mes parents quittaient la plage et allaient prendre l'apéro au bar de l'hôtel - invariablement un spritz, cocktail vénitien délicieusement orange et amer. Nous les rejoignions rarement, préférant profiter le plus longtemps possible de la douce torpeur méridionale pour terminer un chapitre commencé.

Puis, tous les vacanciers prenaient le temps de se transformer pour aller souper dans la grande salle-à-manger. Les corps étaient lavés, rincés, soigneusement hydratés ; les cheveux séchés, éclaircis par les rayons du soleil, se relevaient sur la nuque ou, au contraire, tombaient délicatement sur les épaules ; les maillots et les paréos étaient troqués contre de belles robes, des ensembles distingués, des chemises propres. Les Soeurs C. mangeaient exclusivement du poisson, des légumes, des fruits de mer ; les parents se régalaient de pâtes.

Certains soirs, quand l'hôtel n'organisait pas de buffet dans le jardin ou de soirée animée, nous marchions jusqu'à la vieille ville pour aller boire un cocktail au Siro. J'adorais le bellini, son goût de pêche et ses petites bulles étouffées par l'écume du fruit. Les touristes défilaient sur la place, léchant des cornets de glaces, traînant des poussettes, criant après leurs enfants : nous les regardions passer en discutant joyeusement, en parlant des projets de chacun, en lançant des pronostiques pour l'année à venir.

Et quand nous rentrions, un groupe de deux, un groupe de trois, chacun au bras l'un de l'autre, comme les deux parties inséparables d'un cercle soudé, nous formions ce petit convoi familial et charmant, cette entité unique et inébranlable : la famille C.

Illustration : la divine Margaux Motin.

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Commentaires
D
Ce joli texte nous enveloppe d'une douce ambiance chaleureuse!
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